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Miyazaki : d'une inspiration personnelle à des sources d'inspiration culturelles et atemporelles

  • Maguy
  • 14 mai 2021
  • 7 min de lecture

Né dans la capitale du Japon en 1941, Miyazaki – qui signifie littéralement « le palais sur le promontoire » - est passionné par le dessin dès son plus jeune âge. Lors de la sortie du premier film d'animation de son pays en 1958, Le serpent blanc, - qui au Japon est un symbole d'immortalité -, il a une révélation : il a l'intime conviction qu'il devra faire carrière dans l'animation. Cinq ans plus tard, il obtient une place au sein du studio Toei Animation, où il attire l'attention grâce à son talent de dessinateur.

Au fil du temps, il commence à travailler sur ses propres films ; mais ce n'est qu'en 1984, lors de la sortie de Nausicaä de la vallée du vent, qu'il deviendra vraiment célèbre dans son pays. Grâce à cela, il a pu ouvrir dès l'année suivante son propre studio d'animation : Ghibli. Le « ghibli » [guibli] est un terme italien qui signifie « vent saharien ». C'était également un avion de reconnaissance italien pendant la guerre.

En plus d'être le créateur du plus grand studio d'animation japonaise, Hayao Miyazaki est antimilitariste, féministe et défenseur de l'environnement, ce qui est évident quand on visionne ses travaux. À ce propos, un japonais a déclaré, en parlant de lui: « La raison de son succès, c'est qu'à travers ses films il nous fait redécouvrir la culture traditionnelle du Japon. On voit des forêts, des rivières et des divinités. On retrouve dans ses œuvres tout ce que l'on a oublié de notre monde moderne. » Miyazaki est probablement la seule personne au monde qui a pu s'offrir un musée à son effigie de son vivant. Il s'agit du Musée Ghibli qui a un succès monstre.

Afin de réaliser ses films, il s'est inspiré de sa propre vie et de sa culture natale. Par exemple, Mon voisin Totoro, 1988, - dans lequel deux sœurs, Satsuki et Mei, font la rencontre du protecteur de la forêt – s’appuie sur un épisode difficile de son enfance : En 1947, sa mère est diagnostiquée de la tuberculose et a été hospitalisée pendant neuf ans. Cet incident l'a inspiré pour faire une grande partie de l'intrigue.

Ce film a eu tellement de succès que Totoro est devenu l'emblème du studio Ghibli après sa sortie.

Miyazaki a un jour annoncé : « Il y avait la volonté de ma part de parler de la forêt. Pour moi elle est un véritable être vivant. Mais l'incarner avec un arbre qui marche, ce n'est franchement pas la meilleure idée. Alors j'ai cherché à concevoir une sorte d'animal fantastique qui puisse exprimer toutes les valeurs importantes présentes dans les plantes, les arbres et la nature. C'est comme ça qu'est né dans mon imagination le personnage de Totoro ». Le chat-bus dans ce film est un clin d’œil au chat dans Alice au Pays des Merveilles, de Lewis Caroll, paru en 1865.


Ensuite, Kiki la petite sorcière (Le service de livraison rapide de la sorcière, de son titre original), 1989 – qui raconte l'histoire d'une apprentie sorcière s'en allant vivre en ville pour devenir plus tard livreuse de pâtisseries sur balai –, est inspiré du livre pour enfants du même nom de l'écrivaine Eiko Kadono. Il est une façon simple d'enseigner aux enfants la découverte de soi et des autres.

Quant à elle, Princesse Mononoke (fantôme, esprit), 1997, - là où nos personnages principaux, Ashitaka et Sen, s'allient pour protéger la forêt – prend ses racines à partir de l'île Yakushima. Après la sortie du long métrage, la forêt qui peuple l'île a été rebaptisée « forêt Mononoke ».


Le voyage de Chihiro (La disparition comme par enchantement de Sen et de Chihiro), 2001, a reçu l'Oscar du meilleur film d'animation en 2003. Il est l'un des plus grands succès de l'histoire du cinéma nippon. Dans cette histoire, la jeune Chihiro doit sauver ses parents dans un monde enchanté. Pour faire ce film, Miyazaki s'est inspiré de ses amies d'enfance, afin de leur faire un hommage. De plus, la scène où Chihiro sort un vélo rouillé de l'eau boueuse est inspirée d'un événement de sa jeunesse: « J'ai travaillé au nettoyage d'une rivière et un jour j'ai trouvé une bicyclette coincée au fond. On s'est mis à dix pour enrouler une corde autour du cadre pour la tirer de la boue. »

Puis, Le vent se lève, 2013, se base sur le fait que, pendant la Seconde Guerre mondiale, son père était directeur d'une entreprise d'aéronautique et participait à la fabrication d'avions de chasse. En 1945, la ville d'Utsunomiya où ils vivaient a été bombardée. Miyazaki abhorre la guerre mais est passionné par les avions. Cela a d'ailleurs été représenté dans plusieurs de ses œuvres : Le château dans le ciel, Porco Rosso, Le château ambulant et Le vent se lève. Ce dernier peut être aisément considéré comme une autobiographie car le personnage principal travaille dans l'aviation et son épouse est atteinte de la tuberculose. De plus, l'intrigue se déroule pendant la guerre.

Par ailleurs, notre réalisateur a aussi puisé son inspiration dans des œuvres provenant d'autres cultures et d'autres temps. En effet, Le château de Cagliostro [calliostro] (Maître Lupin : le château de Cagliostro), 1979, s'appuie sur le personnage crée par Maurice Leblanc en 1905 : Arsène Lupin. Nous trouvons également dans ce long métrage un clin d’œil à La comtesse de Cagliostro, du même auteur, 1924. Ici, on y retrouve Lupin. Ce film parle de ce dernier qui tente l'impossible pour récupérer la bague de la comtesse Clarisse.

Le scénario se base également sur un personnage ayant réellement existé : le comte Giuseppe Balsamo de Cagliostro (1743-1795) qui était alchimiste et magicien. À Rome, il fut capturé par l'Inquisition et jugé car considéré comme un sorcier. On le jeta dans un cachot où il y décéda misérablement.

Nausicaä de la vallée du vent, 1984, est l'adaptation du manga, du même titre, de Miyazaki lui-même. Il raconte que seule la princesse d'un petit village réalise que les insectes géants sont utiles pour lutter contre la pollution. Il s'est référé au conte japonais La princesse qui aimait les insectes (fin du 12e siècle). Elle défend l'idée que la beauté n'est que superficielle et qu'il faut regarder le charme intérieur. Nausicaä est d'autre part une figure emblématique de la mythologie grecque. Elle est de surcroît présente dans l'Odyssée d'Homère (vers les 8e et 7e siècles avant Jésus-Christ). Ici, elle est une princesse qui aide Ulysse alors qu'il vient de faire naufrage.

Le château ambulant (Le château infernal d'Hauru), 2004, a été, lui aussi, nommé aux oscars en 2006 pour le meilleur film d'animation. Il est fortement inspiré du livre de Diana Wynne Jones, Le château de Hurle, 1986. Il s'agit de Sophie, une jeune femme victime d'un sortilège qui la fait considérablement vieillir. Seul l'amour pourra la délivrer.


Enfin, Hayao Miyazaki a d'autre part réalisé des œuvres dont leur intrigue est à la fois une source d'inspiration propre et un puits d'inspirations étrangères.

Le château dans le ciel (Laputa [lapiouta], le château céleste), 1986, est son film préféré. Dans ce film, Pazu et Lushiita partent à la recherche d'une cité volante. Pour créer Dora ainsi que ses fils, il s'est inspiré de feu sa mère ainsi que de ses frères. Pour réaliser cette œuvre, l'équipe s'est déplacée jusqu'au Pays de Galles afin d'avoir des paysages très précis puisque le réalisateur voulait situer l'intrigue au temps de la révolution industrielle, qui a justement débuté en Grande Bretagne. Le château dans le ciel est un hommage à Voyages de Gulliver du révérend Irlandais Jonathan Swift, 1721.

Puis, pour créer les décors de Porco Rosso (le cochon rouge, en italien), 1992, Miyazaki a voyagé en Croatie pour avoir une ambiance qui fait référence à la Mer Adriatique, puisque l'histoire se déroule entre l'Italie, la Corse et la Croatie. Le personnage éponyme, Porco, est un aviateur victime d'un mauvais sort qui a transformé son visage en celui d'un cochon. Sa cachette secrète est directement inspirée de la plage Stivinia sur l'île de Vis. Notre réalisateur s'est servi de ses propres traits pour dessiner Porco. À l'entrée de la maison du premier, on peut lire « La maison du cochon », ce qui indique que Miyazaki a de l'autodérision.


Ponyo sur la falaise, 2008, s'appuie sur l'adaptation de Disney La Petite Sirène du conte de Hans Christian Andersen, 1837. Dans cette version japonaise, le petit Sôsuke rencontre un bien étrange poisson qu'il prénommera Ponyo, du fait que « ponyo » est une onomatopée japonaise qui désigne le bruit que fait un objet imbibé d'eau lorsqu'on y enfonce le doigt. Pour réaliser ce film, Miyazaki, alors âgé de soixante-six ans et songeant qu'il se rapprochait peu à peu de l'autre monde, se demandait ce qu'il pourrait dire à sa mère quand il la retrouverait ; d'où la scène où Sôsuke retrouve une vieille femme.

Par ailleurs, le bateau sur lequel navigue le père du petit garçon s'appelle le Koganei Maru (le petit Koganei), en référence au quartier Koganei où sont situés les locaux du studio Ghibli. De plus, la ville portuaire où se déroule l'action prend ses repères d'après la ville de Tomura, située à l'ouest du Japon.

Pendant la production du film, Miyazaki a écouté « La walkyrie » de Richard Wagner. Il n'est par conséquent pas étonnant de savoir que le véritable nom de Ponyo est Brunehilde, puisque la sœur aînée des walkyries s'appelle ainsi. De plus, Ponyo est la première née d'une fratrie de poissons.


Ainsi, sachant mêler expériences propres, œuvres littéraires et musicales, personnages ayant réellement existé et paysages de divers horizons, Miyazaki a su, depuis des générations, nous émerveiller tout en nous faisant réfléchir sur des choses simples mais pourtant essentielles de la vie. D'ailleurs, il a un jour dit ceci : « Nous pouvons montrer aux enfants à quel point la vie vaut la peine d'être vécue. […] On a plus tendance à juger les films sur le nombre d'entrées qu'ils vont faire ou sur l'intérêt qu'on leur porte à leur sortie. Mais ce qui nous importe c'est de faire un film que les enfants iront voir et qu'ils auront envie de montrer à leurs enfants quand ils seront grands. »



- Maguy -

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