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Pourquoi les mauvais films sont-ils nécessaires ?

Dernière mise à jour : 15 août 2020

Auteur : Thalien



C’EST QUOI UN MAUVAIS FILM ?


Qu’est-ce qu’un mauvais film ? La question se pose entre deux bouteilles de vin lors d’un repas beaucoup trop animé pour qu’elle ait du sens et pourtant, qu’est-ce qui différencie le bon film du mauvais ? Les inconnus répondent à cette question : « Un bon film, c’est le mec, il a une caméra, il filme... alors que le mauvais film, c’est le mec, il a une caméra, il filme... Mais c’est un mauvais film.»

Au delà du fait que si on s’y penche un peu, ils n’ont pas tout à fait tort, rentrons un peu plus dans le vif du sujet.

Peut-on considérer un film comme étant mauvais avant même que celui-ci ne soit sorti ? Je ne pense pas. Si un film est considéré comme mauvais, "daubé du cul", mal joué, mal tourné, comme étant un affront à mes principes, sexiste, communiste, raciste, augmentant mon taux d’atélophobie (qui est la peur de l’imperfection ; Merci le Poulpe pour nous aider à gagner au scrabble) c’est à cause de beaucoup d’éléments mais la principale raison reste sa réception. Si la presse et le public n’aiment pas le film, il sera considéré comme mauvais. Et c’est bien dommage, parce que certaines œuvres n’ayant pas reçues de critiques avantageuses se retrouvent dans l’oubli et même parfois catégorisées de nanars alors qu’elles ont su apporter quelque chose de nouveau sur le grand écran.


MAUVAIS NE VEUT PAS DIRE NANAR...

On parlera donc de mauvais film lorsque celui-ci ne répondra pas à différents critères. On peut ainsi retrouver dans un film un scénario bancal, fournis de dialogues aléatoires, des acteurs qui ne savent pas jouer, des costumes inexistants, un décor fait en pâte à modeler, un tournage chaotique, une mauvaise publicité, bref, toute une multitude de raisons qui font qu’à sa sortie on se dise : plus jamais.

Pourtant, j’aime à croire que chaque film est le bébé d’une ou plusieurs personnes qui le mettent au monde par une idée, le façonnent pendant 9 mois et le délivrent à la vue de tous avec la plus grande des fiertés dans leurs regards.

Parlons scénario. Prenons en exemple le trop peu célèbre Iron Sky de Timo Vuorensola (précisons que c’est un film basé essentiellement sur le crowdfunding). Ce film est considéré comme mauvais pour la simple et bonne raison que son scénario est tellement absurde que la majorité du public l'ayant regardé n’a pas apprécié son ambiance. Et c’est compréhensible, des nazis vivants sur le côté caché de la Lune qui kidnappe la première personne noire à aller sur celle-ci afin de faire réélire Sarah Palin pour son deuxième mandat en tant que présidente des États Unis... oui, ça fait mal. Mais il ne faut pas tout jeter d'un bloc. Si on observe ce film dans le détail, les effets spéciaux utilisés sont excellents, magnifiques et réalistes à souhait. J’oserais même dire qu’ils sont innovants pour un film de science-fiction Européen. Donc certes, le scénario est parfois bancal, et le jeu des acteurs pourrait être amélioré, mais j’espère




vraiment que ce film a su redorer l’image que le monde pouvait se faire de nos films « spatiaux » et a montré que le cinéma Européen peut encore rivaliser avec ses concurrents outre Atlantique.


Dans la même vague, observons maintenant Highlander 2. Clairement, les scénaristes ont fait un doigt d’honneur au premier opus pour créer un nouvel univers MAIS plus poussé sur le côté intellectuel. Les dialogues sont affreux mais l’idée que la Terre arrive au bout de sa couche d’Ozone et que les scientifiques créent un bouclier planétaire plongeant l’humanité dans l’obscurité !! Wow. Contrairement à Iron Sky, Highlander 2 aura eu une bien meilleure réception au Box-Office. Je l’ai regardé en pensant tomber sur un nanar de ma jeunesse sans but et c’était le cas jusqu’à ce que je me rende compte des efforts qui avaient été apportés aux décors et aux soins attentifs des prises de vue.




Et c’est le principe même de cet article. On ne sera pas forcément d’accord sur la qualité scénaristique ni sur la mise en scène et ce serait paradoxale de parler du jeu d’acteur de Christophe Lambert mais on sent que Russel Mulcahy (Le réalisateur, surtout connu pour Highlander et un des épisodes de Resident Evil) a mis tout son talent en œuvre pour nous offrir une image époustouflante, sombre et gothique en prenant parfois des risques osés avec sa caméra pour nous plonger dans du grand spectacle.

Lorsque Gremlins est sorti en 1984, il a fait un flop mais maintenant fait clairement parti de la pop culture 40 ans plus tard. Pourquoi ? Parce que son ambiance est ancrée dans l’air du temps. Parce que les décors font rêver. Parce que Gizmo est vraiment trop cool. Parce qu’un film comme celui-ci est écrit, ré-écrit, encore et encore, réalisé à plusieurs reprises, en cherchant des solutions face à de nombreux problèmes... Parce que ce projet fini a pris le temps de se faire et a cherché la rigueur face à l’envie de le sortir le plus rapidement possible. Peut-être aussi parce que comme Highlander 2, le film s’est construit entièrement en studio, ce qui nous donne un sentiment d’intemporalité et de réalisme cinématographique (j’entends par là que la réalité qui nous est offerte semble bien plus

simple à admettre que lorsque le film se passe dans un décor réel) qui transmet au public la vrai vision du cinéma. Le faux rendu réel.

La réalisation y est donc pour beaucoup. Cependant, ce n’est pas le cas de certains autres films. Movie 43 (My Movie Project en français) est ce type de film. Osé dans son choix d’acteurs (Hugh Jackman, Elizabeth Banks, Emma Stone, Halle Berry, Kate Winslet, Richard Gere, pour ne citer qu’eux...) pour un scénario à sketch. Je vous le dis tout de suite ce n’est pas une comédie romantique comme Coup de Foudre à Nothing Hill. Le fait est que c’est un film vulgaire et sans grand intérêt scénaristique mais bordel que ça fait du bien de voir de grands acteurs se mettre dans des situations improbables à l’encontre de leur personnalité et qui nous rappellent que ce sont des acteurs avant tout et que le cinéma peut encore nous épater. Parce qu’un film c’est aussi ses personnages. Des personnages inventés ou non, joués par de bons acteurs ou non. Le cinéma, c’est la personnalisation d’un projet humain, joué par des humains pour des spectateurs qui doivent y croire. C’est la beauté d’un film. Aussi, peut-on considérer qu’un film soit mauvais si celui-ci est joué avec des acteurs qui osent quelque chose qui n’a jamais été osé auparavant ? Encore une fois le scénario y est pour beaucoup puisque c’est par celui-ci que nous allons juger le talent d’un acteur. Il n’y aura pas de spoil mais ce très TRÈS mauvais film nous prouve que le cinéma a encore de beau jour devant lui tant l’absurdité de quelques scènes rassureront certains d’entre nous que le politiquement correct n’est pas une obligation et qu’il y a encore des auteurs qui osent faire un projet sans se reposer sur des suites.


« UN PROJET SANS SE REPOSER SUR DES SUITES »


Ce qui m’amène au sujet des suites, prologues, préludes, reboot, extinction, chapitre finale, le retour, la revanche... le problème que je me pose depuis que j’ai commencé cet article c’est que je ne crois pas que les mauvais films aient vraiment un impact sur les producteurs qu’ils soient Américains ou Français. Je m’explique. Prenons les films adaptés de BD (Spirou et Fantasio, Le petit Nicolas, Lucky Luke, Astérix...) toutes ces histoires qui ont bercées notre enfance et sont arrivées sur grand écran, c’est un grand F**k pour détruire le peu de rêve que l’on possédait encore de nos héros. Chacun de ces films sont pires les uns que les autres. Et pourtant ils resurgissent toujours, un par an, devenant de plus en plus affligeant. Le Poulpe a voulu en savoir plus et a réussi un entretien avec un producteur Français réputé dont nous tairons le nom afin de ne pas entacher son image.


Poulpe : Depuis quelques années on voit surgir tout type de film adapté de BD, pourtant la recette est souvent identique et la réception trop faible comparée à certain films d’auteur, pouvez-vous nous expliquer cet engouement ?

Producteur : Tant que l’on peut faire de l’argent sur la mélancolie des adultes pour leurs bande dessinés en embrigadant leurs enfants pour la nouvelle génération... un film adapté ne coûte pas cher et le scénario est souvent déjà écrit d’avance, pareil pour la mise en scène. C’est de l’argent facile.

Le budget du film y est pour beaucoup. Le 7ème art coûte de l’argent et de l’argent, il n’y en a pas à moins de faire partie d’un bon studio et/ou d’avoir fait ses preuves. Encore moins si le film en question est avant-gardiste ou possède un scénario trop farfelu. Lorsque le réalisateur se voit offrir des miettes alors qu’il pensait pouvoir engager Tom Cruise et Michelle Pfeiffer pour son prochain film sur un jardiner dans le Périgord, il doit faire des concessions. Je vous vois venir, “Oui mais y a certains blockbusters qui sont nuls” et c’est vrai. Ce n’est donc pas qu’une simple question d’argent mais ça contribue grandement. Moins de moyens signifie moins de décors, moins de costumes (ou des costumes de mauvaise qualité), devoir engager des acteurs de seconde zone, et souvent moins de temps pour filmer (prix du plateau, de la location de matériel et du personnel). Malgré tout, le réalisateur veut voir son bébé apparaître sur le grand écran et après des semaines, mois ou années son film dans lequel il a placé tellement d’espoir sort en même temps qu’un Christopher Nolan sur exactement le même thème... C’est la fin.


« C’est de l’argent facile ». Voilà une des raisons pour lesquelles les films sont médiocres voir mauvais. Le but du producteur, devenu frileux de devoir faire toujours plus de rendement propose des films à plus petit budget, tout juste plaisant au grand public afin que le spectateur ne se pose pas de question, ne réfléchisse plus par lui-même et se zombifie devant une parodie de bon film, le tout, afin de faire honneur à la petite sœur du cinéma, la télévision et son engouement pour les émissions de télé réalité. Il faut que le visionneur soit gavé de sexe, de violence, d’humour graveleux, de racisme, de débilité mentale pour que celui-ci se sente bien et se complaise dans le confort de son canapé.


CEPENDANT MES AMIS, IL Y A DE L’ESPOIR


Certains réalisateurs ont compris l’enjeu et ne se laissent plus faire devant les réticences des grands studios et font ce qu’ils pensent être le plus proche de leurs valeurs cinématographiques alors que leurs budgets sont massacrés, leurs acteurs souvent inconnus et leurs matériels forcément plus amateur. Ces films qui nous claquent alors que tout porte à croire qu’ils vont être mauvais (s’ils sortent au cinéma, ce qui n’est pas toujours le cas), insignifiants comme The Man From Earth ou Ink , ou à l’inverse qu’ils fassent tellement parler d’eux avant que le film sorte du à leur premier succès qu’ils ne répondent plus à l’attente du spectateur (Cloud Atlas, Swiss Army Man) et sont mis de côté.


AU FINAL, ÇA DONNE QUOI ?


Pour résumer, il faut se rendre compte que la qualité d’un film est forcément subjective d’une personne à l’autre donc un mauvais film pourra être bon pour un autre et vice versa. Je me baserai alors sur mes propres valeurs pour décider ce qui fait pour moi un bon film : son scénario et sa réalisation. Le scénario est la pièce maîtresse et essentielle de la pellicule. S’il est utilisé, en faisant varier seulement un ou deux éléments il y aura de la lassitude. La plupart du temps, une histoire arrive quand même à sortir du lot. Le scénariste se fait donc offrir un contrat juteux mais en retour va devoir pondre un scénario par an, la quantité préférable à la qualité, les suivants feront un flop. Pourquoi pensez-vous que Christopher Nolan prend 2 ou 3 ans à sortir ses chef d’œuvres ? J’ai toujours trouvé plus simple de pondre une histoire « tirée de faits réels » que de créer son propre scénario. Et c’est la pièce maîtresse du cinéma à mon avis. Que le film soit bon ou mauvais, ce qui le rend unique c’est son histoire. Alors c’est vrai, il peut être massacré par les acteurs, ou par sa réalisation mais si le spectateur arrive à croire au monde qu’on lui montre, et qu’il arrive encore à être surpris alors le pari est un succès.

La réalisation est elle tout aussi présente. Ce n’est pas le budget qui fait un film mais la volonté du réalisateur de montrer ce qu’il souhaite vous faire voir sur grand écran. C’est l’effort qu’il passera derrière sa caméra et en post production pour rendre un travail achevé et parfait à ses yeux. C’est par des prises de vue en tableau (je pense à Napoleon Dynamite, dans lequel l’histoire apporte moins que les prises de caméra) qu'alors même que l’histoire ne tienne pas la route, nous soutenons notre regard à l’écran pour voir tous les détails d’une scène aussi simple soit elle.

Le cinéma est une histoire de passionnés qui essaient d’offrir au spectateur un moment de vie hors du temps et unique. Ce n’est pas bon ou mauvais et il faut parfois voir au-delà des acteurs pour comprendre la complexité mis en œuvre afin de nous surprendre. Et c’est parfois dans les films les plus insignifiants, que l’on trouve des perles de talent. C’est dans ses choix pour créer cet univers si spécial que même le plus mauvais film peut contribuer à la notoriété du grand écran. Après tout, c’est par de mauvais films que l’histoire de notre humanité se fait. Sans Vidocq, il n’y aurait pas eu de film numérique, sans scénaristes qui s’essaient sur d’autres films comme Franck Darabont (Freddy 3, Le blob, La mouche 2) il n’y aurait pas eu Les Évadés. Il faut parfois des films « mauvais » qui serviront de brouillons ou d’essais pour créer un chef d’œuvre. Toutes ces personnes cherchant à innover les éléments que sont le scénario, le décor, la prise de vue, la couleur, le son alors même que leur projet est « mauvais » de base sont nécessaires pour l’avancé cinématographique dans le temps. Vive les mauvais film, vive le cinéma.

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