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Ex Machina, d'Alex Garland




Caleb Smith, 26 ans, est programmateur chez Bluebook, le premier moteur de recherche au monde. Il reçoit un jour une invitation à passer une semaine dans la propriété du créateur de l'entreprise, Nathan, mais, une fois sur place, apprend qu'il est en réalité au cœur d'une expérience déterminante sur l'intelligence artificielle...


Le script est simple, le propos l'est moins. Pour sa première réalisation, Alex Garland (l'auteur de La Plage, adapté au cinéma par Danny Boyle) a décidé de réaliser un huit clos, et s’en sort bien lorsqu’il s’agit de mettre en scène l'ambiance du centre de recherche qui sert de maison à Nathan, véritablement oppressante. De nombreux plans mettent en évidence la froideur et la solitude des couloirs parfaitement propres et blancs de l'endroit, entouré d’un décor faussement idyllique. Le lieu est à l'image de son propriétaire : avenant de prime abord, inquiétant dès que l'on s'y attarde un peu. Garland sait parfaitement l’environnement dans lequel ses personnages évoluent pour rendre son film claustrophobique, et transmettre la sensation d'enfermement ressentie par Ava, la femme robot avec laquelle Caleb interagit pour l'expérience de son patron.


Le film est construit principalement autour de cette interaction, et ce sont les différentes discussions entre Caleb et Ava qui rythment le scénario. Petit à petit, on voit Caleb tomber sous le charme d'Ava, alors qu'elle-même tente de comprendre ce qu'elle est réellement. La femme robot tente de se trouver une raison d'exister en définissant précisément des concepts aussi vastes que l'amitié, l'amour ou la sexualité, alors que l'on voit Caleb douter de plus en plus de sa propre humanité, jusqu’à cette scène glaçante où il semble avoir définitivement perdu la raison. Les interprètes y sont pour beaucoup : Domhnall Gleeson apporte sa fragilité au personnage un peu stéréotypé du nerd fasciné par la femme idéale, alors qu'Alicia Vikander parvient sobrement à rendre son personnage robotique aussi humain que possible. Quant à Nathan, Oscar Isaac est brillant dans son rôle de scientifique méticuleux mais dangereux pour lui-même et pour les autres. A travers ces trois personnages, le réalisateur rend les rapports de domination et de manipulation de plus en plus flous : Nathan manipule-t-il Caleb ? Caleb manipule-t-il Nathan ? Ava manipule-t-elle Caleb ? Et c'est là que l'intrigue réussit véritablement à surprendre.


Pour Alex Garland, la question de l'intelligence artificielle est complexe, car comme Caleb, il se demande où se trouve la limite entre la création et la perte de l'humanité. Il présente Ava comme une créature belle et fragile mais également dangereuse si elle devient trop libre. Ava, c'est Eve, celle qui pousse l'homme à l'erreur. Nathan, en la créant, se prend un peu trop pour Dieu, isolé dans sa propriété perdue au milieu d'une nature vaste et magnifique, sorte de jardin d’Éden privé. Et au milieu se trouve Caleb, l'homme simple, dont l'humanité se révèle être une force, mais également une faiblesse lorsque ses sentiments pour la machine prennent le dessus. « Si tu as créé une intelligence artificielle, ce n'est plus l'histoire des hommes. C'est l'histoire de Dieu » affirme Caleb à Nathan. Finalement, les personnages humains d'Ex Machina sont fascinés par quelque chose qui les dépasse, et qui peut-être n'aurait jamais dû exister, mais qu'ils ont bel et bien provoqué eux-mêmes.



Vincent Déjardin

 
 
 

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