Lilith: de la mythologie aux arts
- Le Poulpe

- 5 févr. 2021
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«Nous sommes égaux l’un l’autre dans la mesure où nous avons tous deux été créés à partir de la terre».
C’est à juste titre que toute personne lisant cette affirmation pourrait croire que c’est Ève qui aurait dit cela à Adam, soulignant l’inégalité hommes-femmes, sévissant depuis la nuit des temps.
Cependant, selon des mythes, des légendes, des croyances…, tout laisse à penser que celle qui aurait dit cela ne serait autre que Lilith, supposément la première femme créée par Dieu et aussi la première femme d’Adam.
Lilith serait née dans les croyances mésopotamiennes et juives, entre moins 3000 et moins 1000 avant Jésus-Christ.
Son nom proviendrait de quelques divinités du vent tels que Lilou, Lilitou, Wardath Lili, se muant au fil du temps en Lilith.
Lilou et Lilitou auraient été un Dieu et une Déesse mauvais apportant désordre moral et qui s’attaquaient aux hommes (pour Lilitou) et aux femmes (pour Lilou) durant leur sommeil afin d’abuser d'eux.
Dans la même veine, nous avons la Déesse maléfique Lamashtou qui assassinerait les femmes et les nouveau-nés. Pour faire avorter ses projets, il faudrait demander de l'aide au roi des lilins, les divinités du vent, Pazouzou (le démon dans l’exorciste).
Fort longtemps après, pour les juifs croyants, ces divinités – ou du moins leur nom – auraient supposément évolué en Lilith, démone et succube qui abuse des humains pendant leur sommeil. Dans la religion juive, elle est une figure emblématique du Mal.
Ce qui pourrait laisser imaginer qu'Eve ne serait pas la première femme d’Adam – selon les croyances -, c’est que dans le Talmud, le livre saint des juifs, un rabbin y a rédigé la genèse suivante : « Le Saint béni soit-il avait créé une première femme, mais l’homme, la voyant pleine de sang et de sécrétions, s’en était écarté. Aussi le Saint Béni soit-Il s’y est repris et en a créé une autre ».
Des spécialistes ont retrouvé et daté entre le 8e et le 10e siècle l’alphabet de Ben Sira, un mythe racontant que Lilith serait la première femme créée par Dieu. Laissez-moi vous conter son histoire :
« Alors que Dieu eut créé Adam, qui était seul, il dit « il n’est pas bon que l’homme soit seul ». Il créa également une femme de la terre, comme il avait créé Adam lui-même, et l’appela Lilith.
Adam et Lilith ont immédiatement commencé à se battre. Elle dit : « je ne me coucherai pas en dessous ». Et il dit : « je ne me mettrai pas en dessous de toi mais uniquement au dessus, car tu n’es apte qu’à être en position soumise, tandis que moi je dois être le dominant ».
Lilith répondit : « Nous sommes égaux l’un l’autre dans la mesure où nous avons tous deux été créés à partir de la terre ». Mais ils ne s’écoutaient pas.
Quand Lilith comprit cela, elle prononça le nom ineffable et s’est envolée dans les airs. Adam pria alors son créateur : «souverain de l’univers !, la femme que vous m’avez donné s’est enfuie ». Aussitôt, le Saint Béni soit-Il, a envoyé trois anges pour la ramener.
Le Saint dit à Adam : « si elle accepte de revenir, ce qui tout ira bien. Sinon, elle devra accepter de voir cent de ses enfants mourir chaque jour ».
Les anges quittèrent Dieu et poursuivirent Lilith, qu’ils rejoignirent au milieu de la mer. Ils lui dirent la parole de Dieu, mais elle ne souhaita pas revenir.
Les anges dirent : « nous te noieront dans la mer ». « Laissez-moi !, dit-elle , je n’ai été créée que pour causer des maladies aux nourrissons. Si l’enfant est un homme, j’ai la domination sur lui pendant huit jours après sa naissance, et s’il est une femme, pendant vingt jours ».
Quand les anges entendirent les paroles de Lilith, ils insistèrent pour qu’elle revienne. Mais elle leur a juré par le nom du Dieu vivant et éternel : «chaque fois que je vous verrai ou vous ou vos formes sur une amulette, je n’aurai aucun pouvoir sur cet enfant ».
Elle a également accepté de faire mourir cent de ses enfants chaque jour. En conséquence, chaque jour, cent démons périssent, et pour la même raison, nous écrivons les noms des Anges sur les amulettes des jeunes enfants. Quand Lilith voit leur nom, elle se souvient son serment, et l’enfant se rétablit ».
De fait, Lilith est devenue un symbole de solidarité féminine chez les juifs du fait qu'elle ait acquis sa liberté au prix de la perte de ses enfants.
Par ailleurs, dans le zohar (13e siècle), Lilith ne s’est pas totalement libérée de sa « soumission » aux hommes. En effet, quand elle s’est échappée de l’Eden, elle a rencontré Samael, un archange déchu, et est devenue sa compagne. Certaines personnes sont d’avis que Samael pourrait être en réalité le nom angélique de Satan. Par conséquent, Lilith serait l’une des reines des enfers, et dirigerait 480 légions de soldats démons.
De nombreuses légendes gravitent autour de cette « femme ». Elle pourrait être le serpent tentateur ; elle aurait été fécondée par Caïn, l’un des fils d’Adam et Ève, et aurait donné naissance à des enfants démoniaques. C’est peut-être elle qui aurait poussé Caïn à tuer son frère Abel. Lilith serait même l’une des têtes du léviathan, ou du moins sa femelle. Elle pourrait être à l’origine des vampires et de la sorcellerie.
Ensuite, d’après la légende, Dieu aurait castré Samael et Lilith pour qu’ils n’aient plus d’enfant. Faisant ainsi de Lilith la première succube.
C’est principalement grâce à la pièce de théâtre Faust (1808), écrite par Johann Wolfgang Von Goethe, que Lilith s'est fait connaître. Cette pièce de théâtre à pour personnage éponyme Faust, un protagoniste inspiré de Johhan Georg Faust, un alchimiste, astrologue et magicien allemand né en 1480 et décédé en 1540. Il est devenu le héros d’un conte populaire et de pièces de théâtre nés de la plume de Christopher Marlowe et Gotthold Ephraim Lessing.
Dans Faust, Lilith est une sorcière. Méphistophélès, le prince des Enfers, dit ceci de cette dernière, en s'adressant à un autre personnage : « considère-la bien, c'est Lilith ; la première femme d'Adam. Regarde ses beaux cheveux, parure dont seule elle brille. Quand elle peut atteindre un beau jeune homme, sois sûr qu'elle ne le lâchera pas de sitôt ».

Quelques décennies plus tard, en 1866, le peintre Dante Gabriel Rossetti a réalisé un tableau intitulé Lady Lilith. Le modèle dont il s'est inspiré était Fanny Cornforth, sa muse et maîtresse.
Ici, Lilith n'est pas représentée comme un monstre, mais bien comme une lady voluptueuse et vaniteuse de par le fait qu'elle semble subjuguée par son reflet.
Lady Lilith s'accompagne d'un poème, écrit par Rossetti lui-même :
« On raconte que la première femme d’Adam, par sa douce voix, pouvait tromper l’ouïe du serpent, et que sa chevelure fut le premier or. Elle est jeune encore en ce monde vieillit, et se contemple, fatale, piège les hommes, dans la toile magique qu’elle tisse. Et capture leur cœur, leur corps et leur vie ».
Ensuite, toujours au 19e siècle, le pasteur protestant Écossais George MacDonald a rédigé un roman, Lilith (1895). Il a exercé sa fonction religieuse dans les années 1850 mais, à cause de ses conceptions religieuses jugées inappropriées, il a été rejeté par sa congrégation et s'est tourné vers l'enseignement et l'écriture. MacDonald défendait l'idée du salut universel, accordé à l'intégralité de la création, qu'il s'agisse des humains, des animaux ou encore du Diable.

Lilith est une quête qui se raconte en deux histoires : d'un côté nous avons celle du jeune Vane qui accomplit un voyage fantastique. De l'autre, c'est l'histoire de Lilith, la reine des ténèbres.
Près d’un siècle plus tard, en 1974, le groupe de rock britannique Genesis a sorti un album, The lamb lies down on Broadway (l'agneau se couche sur Broadway ). Chaque chanson raconte une étape des aventures de Raël qui voyage dans des univers fantastiques.
Dans cet album nous pouvons entendre la chanson « Lilywhite Lilith », qui décrit la rencontre de Raël et de Lilith. Elle est aveugle et apparaît au beau milieu d'une immense foule bruyante. Lilith demande de l'aide à Raël et l'emmène dans une grotte. Là, il doit faire face à ses peurs dans les ténèbres. Lilith sera alors son guide.
Quant à lui, François Marcela-Froideval a créé une bande dessinée intitulée 666, qui est parue de 1993 à 2000. Elle narre les péripéties du prêtre révérend Carmody, préférant le pistolet à l'hostie. Les portes des Enfers s'ouvrent sur notre monde et Lucifer ordonne à sa fille, Lilith, de mener ses troupes afin d'envahir la Terre. Mais Carmody, épaulé par les Nations Unies et toutes les religions du monde, y compris le Vatican, luttent contre les démons. L'invasion démoniaque semble maîtrisée, jusqu'à ce que Lilith lance la contre-offensive…
De l'autre côté de la Terre, au Japon, Anno Hideki a réalisé une série d'animation en 1995 qui s'appelle Neon Genesis Evangelion.

En l'an 2000, un astéroïde est entré en collision avec notre planète, ce qui a provoqué un cataclysme qui a détruit une grande partie de la Terre. Quinze ans plus tard, les civilisations ont surmonté cet accident mais des créatures nommées «anges» veulent détruire Tôkyô-3, la nouvelle capitale-forteresse du Japon.
Pour les combattre, une organisation secrète a construit une arme de destruction anthropoïde. Elle a été baptisée «Evangelion». Suite à cela, Shinji Ikari (frénésie en japonais), quatorze ans, se rend à Tôkyô-3 car son père, le directeur de l'organisation secrète, l'y a invité. C'est donc à ce jeune garçon qu'incombe la tâche de sauver le monde…
Dans Neon Genesis Evangelion, Lilith est le second «ange». Le premier «ange» est Adam. Les anges – tels qu'on les connaît – sont les descendants d'Adam, et Lilith est l'ancêtre du «lilin», c'est-à-dire des humains. Des milliards d'années auparavant, le vaisseau de transport de Lilith est entré en collision avec la Terre, créant ainsi la Lune. Adam était déjà présent sur la Terre et il y a déposé sa graine d'ange. Lilith a ensuite planté sa semence et se sont ensuite développées les vies animale, végétale et celle des mycètes.
Finalement, en 1999, David DeCoteau a réalisé un film d'horreur au nom de Witch House.
En mai 1998 dans la ville de Dunwich (elle est fictive), dans le Massachusetts, Elisabeth rassemble un groupe d'amis spécialement choisis pour une fête étrange. Il se trouve qu'Elisabeth est la descendance d'une sorcière maléfique qui se nommait – on ne la présente plus – Lilith. Elle a été brûlée sur un bûcher il y a précisément trois cents ans. Désormais Elisabeth souhaite ressusciter son ancêtre et pour cela elle a besoin de sacrifier quelques personnes…
Ainsi, ce mythe nous raconte l'histoire d'une création de Dieu, qui voulant être l'égale de son homologue masculin, sacrifia son bonheur contre sa liberté.
Nous pourrions nous demander si cette légende ne mettrait pas en doute l'omnipotence du Seigneur.
-Maguy-






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